Frédéric Hauss

Frédéric Hauss

Frédéric Hauss est né le 31 mars 1908 à Strasbourg (alors annexée par l’Allemagne), fils de Frédéric, commerçant, et de Catherine Ferrenbach.
Il quitte sa famille à l’âge de 14 ans pour travailler comme garçon de salle sur les paquebots de la Compagnie de Navigation Sud-Atlantique (ligne Bordeaux-Lisbonne-Rio de Janeiro-Santos-Montevideo-Buenos Aires) : le «Massilia» , le «Lutetia»…

Il épouse le 5 juin 1930 à Mâcon Alice Delorme (décédée à Bordeaux en 1965). Un fils nait en 1932 à Bordeaux.
Il est garçon de café rue de la Gare à Bordeaux en juin 1934 (alors impliqué dans une rixe avec un de ses collègues), et dit domicilié 28 rue des Argentiers.
Mobilisé en 1939 au 57e R.I. (Bordeaux), puis au 36e, il est fait prisonnier le 20 juin 1940 dans la région de Toul, et libéré le 1er août.
A compter du 12 août 1940, il est interprète à la caserne Pelleport (9-11, rue de Cursol), anciennement caserne du 57e RI, où s’est installé le groupe 14 de la GFP, la Geheime Feldpolizei, dépendante de l’Abwehr (le service de renseignement de la Wehrmacht). C’est une police secrète, rattachée à l’Administration militaire, qui transmet directement les dossiers des affaires instruites au tribunal militaire allemand pour jugement.

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La caserne Pelleport vers 1915

Il travaille ensuite dans la Marine allemande (peut-être toujours à la GFP, il est dit « navigateur »), enfin à la « Gestapo » (SiPo-SD) (installée au Bouscat) à partir du 10 décembre 1943. Il est employé au mess ou bien traduit des lettres.
Souvent épris d’alcool, toujours armé d’un revolver, il participe à plusieurs interrogatoires au Fort du Hâ.
Il est toujours officiellement garçon de café, domicilié 58 rue des Faures à Bordeaux (quartier St-Michel) en 1944.
Le 13 février 1944, il est muté à l’annexe du SiPo-SD de Bayonne (logé Villa Mont Carmel, où ont lieu les interrogatoires de suspects), et touche 4500 francs par mois.

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La Villa « Mont Carmel » boulevard Soult à Bayonne (actuel GRETA)

Il participe à plusieurs reprises à des arrestations, interrogatoires, tortures et expéditions allemands :

  • du 27 au 29 juin contre un maquis du Corps-franc Pommiès à l’Hôpital-Saint-Blaise, où il rejoint les 500 ou 600 Allemands venus de Mont-de-Marsan, menace les habitants soupçonnés de cacher des Résistants, frappe Jean Puyade à coups de crosse (celui-ci mourra en déportation), un fermier avec un poteau, puis prend part aux interrogatoires des personnes arrêtées à Biarritz et à la prison de Bayonne (20 arrestations, 9 déportés, dont 7 sans retour, les 6 hommes à Mauthausen, les 3 femmes à Ravensbrück). Il est présent à la Maison Blanche de Biarritz lors de l’interrogatoire des femmes arrêtées (décrit comme « particulièrement méchant » par l’une-d’elles, Marie-Louise Davancens).
  • du 21 au 26 juillet à Mauléon, où il mène l’interrogatoire du boucher Montalibet (frappé par les autres Allemands).
  • à Saint-Sever, où « il s’installe en maître » et tente d’obtenir des renseignements sur les maquis de la région.
  • Le 28 juillet, il semble qu’il soit présent (« Frédéric ») lors de l’interrogatoire du résistant Gaston Laboudigue à la prison de Mont-de-Marsan (ou à la Gestapo de la Villa Mathilde, aussenkommando du SD).
  • Les Allemands (au moins un millier d’hommes, venus aussi d’Aire) lancent ensuite une nouvelle expédition contre la maquis jusqu’au Houga (Gers), où Hauss arrive le 6 août armé d’une mitraillette, via Grenade, Cazères et Le Vignau. Renseigné par Jacques Minihy (agent de la Gestapo de Mont-de-Marsan, « spécialisé dans la recherche des maquis »), il se dirige alors vers l’hôtel Lestage, tenu par Marthe Lafontan, où il procède aux vérifications d’identité. Henri Thiébaud est alors démasqué, il porte sur lui un document compromettant montrant son appartenance au maquis (ancien secrétaire de la mairie de Mont-de-Marsan et dirigeant du Stade Montois, résistant, il participe au ravitaillement du maquis et est recherché par les Allemands). Une veste de lieutenant FFI et une arme sont également trouvées dans sa chambre. Sous la menace, il doit emmener les Allemands jusqu’au maquis du Bois de Bascaules à Toujouse (Gers), qu’ils investissent vers 9h30. En chemin, Jean Labastie, 31 ans, né au Boucau, habitant Villeneuve-de-Marsan, gendarme soupçonné d’être passé à la Résistance, qui revenait de « permission » et est trouvé porteur d’une arme, est arrêté et interrogé. Enfin Pierre Farines, 22 ans, de Villeneuve, envoyé porter un casse-croûte aux Résistants qui faisaient le guet à l’entrée du maquis, est également fait prisonnier.
    Tous trois sont abattus à 11 heures par les Allemands dans le Bois de Bascaules (au PC de la palombière), pendant que Hauss surveille les personnes arrêtées au Houga, enfermées dans un garage proche ou dans la remise de l’hôtel. Une liste de résistants ayant été découverte, c’est au tour d’Henri Combelles, instituteur, qui avait eu le temps de fuir, d’être découvert dans un champ de maïs (emmené à Mont-de-Marsan, condamné à mort par les Allemands, la Libération le sauva). L’Hôtel Lafontan est pillé et dynamité vers 16 h.
    Léonce Nalis et M. Broca, métayers à la limite du Vignau et de Hontanx, arrêtés par la colonne allemande et réquisitionnés pour déblayer un abattis, sont ensuite emmenés à Saint-Sever vers 16 heures. Ils y sont gardés jusqu’au 8, interrogés et bastonnés par Hauss, puis transférés à la prison de Mont-de-Marsan jusqu’au 12, et enfin au Fort du Hâ à Bordeaux jusqu’à la Libération.
    La colonne allemande reste à Saint-Sever jusqu’au 10 août.


Rentré peu avant la Libération à Bordeaux, il y est arrêté et interné au Fort du Hâ, sur les lieux mêmes de ses exactions.
Il est transféré à la maison d’arrêt de Mont-de-Marsan le 4 novembre, un mandat de dépôt est délivré le 23 novembre.

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Incarcération de Hauss et Minihy à la maison d’arrêt de Mont-de-Marsan le 4 novembre 1944 (AD 40) – Pour zoomer, clic droit « Ouvrir l’image dans un nouvel onglet »

« Agent de la Gestapo », il est condamné à la peine de mort le 8 janvier 1945 par la Cour de Justice de Mont-de-Marsan pour « intelligence avec l’ennemi (Bayonne-Bordeaux) ». 10 témoins à charge et un témoin à décharge sont entendus par le tribunal. Il est aussi condamné à l’indignité nationale et au remboursement des frais envers l’Etat (1124 francs).


Son recours en cassation et son recours en grâce (d’office) ayant été rejetés (les 23 janvier et 2 février par le Commissaire du Gouvernement, malgré l’avis favorable du président de la Cour de Justice), il est fusillé le 6 février 1945 à 7h30/7h45 par un peloton de 13 militaires volontaires (ex-FFI) sur un terrain dépendant du camp d’aviation de Mont-de-Marsan (carrière de sable qui servait pour la fabrication du béton), après que le greffier du Tribunal lui ait lu l’arrêt le condamnant et le rejet de son recours en grâce. « L’exécution n’a donné lieu à aucun incident » (note à la presse).


Son complice Jacques Minihy, condamné également à la peine de mort le 26 avril, vit sa peine commuée en travaux forcés à perpétuité le 26 mai…

La Cour de Justice des Landes a prononcé 17 autres condamnations à mort, y compris par contumace. Toutes ont bénéficié de réductions de peine et de mesure de grâce.

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Sources :

Archives Départementales des Landes

Bouysse (G.), Encyclopédie de l’Ordre Nouveau – Histoire du S.O.L., de la Milice Française & des mouvements de collaboration, Vol. 10