Il est né David Chabachevitch le 22 août 1895 à Ariogala (Empire russe, aujourd’hui en Lituanie), fils de Meer/Meyer et de Rivka/Rebecca Dunenstein/Dimenstein (Nohoumova dans son acte de mariage) (la communauté juive d’Ariogala, dont sans doute ses parents, fut assassinée par balles en septembre 1941 par des auxiliaires lituaniens).
Il effectue un premier séjour parisien en 1912, puis il s’installe dans la capitale en 1914 pour rentrer aux Beaux-Arts, car il désirait devenir artiste-peintre (il peindra toute sa vie). Son frère aîné fait son droit à la Sorbonne. A la déclaration de guerre, ils se réfugient en Gironde. Au contraire de son frère, qui décide d’émigrer aux Etats-Unis, David Chabas reste en France, accueilli à Hure (Gironde). C’est là qu’il rencontre sa future épouse. Il aide l’abbé Labrie dans ses fouilles archéologiques et se convertit au catholicisme.
En mai 1915, il décide de s’engager dans le 1er Régiment étranger. Il est au front dans l’Aisne en septembre au 144e RI, puis passe aux 87e et 287e. Il est grièvement blessé par éclat d’obus (avant-bras gauche avec paralysie) au combat de Mort-Homme devant Verdun le 14 avril 1916 (Croix du Combattant Volontaire en 1936). Jusqu’en décembre, il est en traitement à Lyon. Il part ensuite en Orient de 1918 à 1919, à Salonique, où il est interprète français-russe.
Après sa démobilisation, il entre aux Chemins de fer du Midi comme comptable, affecté à La Réole, Caudrot puis Roquefort (dès 1922).
En récompense de son engagement pendant la guerre, il est naturalisé français en juillet 1920.
Il épouse en avril 1922 Cécile Carrasset (née en 1900), institutrice à Hure (« sortie première de l’Ecole Normale des Landes »), 2 enfants.
Il démissionne des Chemins de fer et crée en 1925 une librairie à Mont-de-Marsan, tout en habitant Roquefort (Rue Thiers). Dès 1927, il publie des ouvrages d’histoire, de géographie, de littérature régionalistes.
Il demande et obtient de changer de nom en 1927.
En 1929, il établit une succursale (librairie-galerie) à Hossegor, avant de s’y transférer définitivement en 1931.
Libraire-éditeur-journaliste spécialisé dans le régionalisme, il organise des conférences, congrès d’écrivains, fonde des journaux, etc.
Il vend sa librairie, pour des raisons économiques, en 1934 et s’installe à Capbreton en mars 1937, où il établit un commerce de librairie-papeterie par correspondance. Il y habite la Villa Clairfeuille Rue Traversière.
Il est nommé officier d’Académie en 1935.
Il ne se fait pas recenser comme juif en 1940, pensant en être dispensé comme converti au catholicisme, ancien combattant et époux d’une « aryenne ».
Une enquête prescrite en mars 1942 note que « de 1935 à 1939, il fut un militant acharné des doctrines du Front Populaire ».
Le 19 mars, il fait parvenir à la sous-préfecture un plaidoyer pour demander une dérogation quant aux mesures prises contre les Juifs. Il met en avant son parcours et sa volonté d’intégration. N’ayant pas connu ses grands-parents paternels, il met même en doute son ascendance juive.
Le préfet retient l’argumentation de David Chabas, mais prescrit néanmoins l’apposition de l’affiche jaune « Judisches Geschaft – Entreprise Juive » prévue par les ordonnances allemandes . L’inspecteur Bouillar, chargé de l’exécution, répond que cela lui est impossible, David Chabas ne disposant pour son commerce que d’un entrepôt situé dans son garage.
Il est néanmoins arrêté le 15 avril 1942 par la Feldgendarmerie de Biarritz, n’ayant pu dire adieu à sa femme que menotté et en faisant irruption dans sa classe de Cours préparatoire. Incarcéré à Biarritz à la Maison Blanche, il est transféré la maison d’arrêt de Bayonne le 1er mai 1942 sur ordre des autorités allemandes.
Le 3 juillet, il est transféré à Mérignac sur ordre de la Feldkommandantur 541 (Lettre de la FKR du 25 juin), interné Baraque E. Sur les registres du camp, il apparaît tantôt comme de nationalité lituanienne, tantôt polonaise (ce qui est faux)…
Son entreprise est confiée à un administrateur « aryen » (M. Veyrier en juillet 1942, M. Miremont en avril 1943).
Il est transféré de Bordeaux à Drancy le 26 août 1942, passe peut-être par les camps de Pithiviers ou Beaune-la-Rolande. Appartenant à la catégorie de Juifs en principe « non déportables », l’arrivée d’Aloïs Brunner à la direction de Drancy change la donne, et les Juifs « conjoints d’aryennes » sont envoyés dans un premier temps dans la région de Cherbourg le 16 juillet 1943, incarcérés à la caserne Dixmude de Querqueville, affectés aux chantiers côtiers des fortifications allemandes, avant d’être déportés sur l’île d’Aurigny le 11 octobre (avec 244 autres hommes). Il y rencontre peut-être Léon Kartun, arrêté en juillet 1942 à Hagetmau, et arrivé à Aurigny en août 1943. Ils sont internés au camp de Norderney, où ils travaillent au « Mur de l’Atlantique » pour l’Organisation Todt.
« Le 7 mai 1944, les 440 prisonniers juifs évacuent Aurigny en bateau vers Cherbourg, pendant 10 jours et 9 nuits ils circulent en train de Cherbourg à Hazebrouck, ils s’entassent à cinquante par wagons. A Hazebrouck, ils sont parqués dans un hangar, ce qui permet quelques évasions, puis un tri s’opère : 150, les moins valides sont envoyés au lycée Mariette de Boulogne, les 500 autres sont dirigés vers les camps de Dannes et Camiers (Lager Gneisenau, dans le Pas-de-Calais). Ils y sont à nouveau astreints à des travaux de fortification et travaillent au déblaiement des routes et des voies ferrées, sous les bombardements qui font de nouveaux morts. Ils passent l’été là avant d’être à nouveau évacués vers l’est début septembre. La désorganisation qui fait suite au débarquement des Alliés est propice aux évasions lors du transport et de l’internement. Les détenus non évadés sont finalement sauvés grâce à l’action de la Résistance belge qui parvient, le 4 septembre à Dixmude, à stopper le train et libérer les derniers détenus.
David Chabas s’évade du Camp de Camiers le 5 (?) septembre 1944, et dit « rentré dans ses foyers 1/09/1944 » (?). Il devient président du comité d’entraide aux déportés politiques à Capbreton.
Il reprend son activité d’éditeur après la guerre, produisant des dizaines d’ouvrages dont beaucoup sont des références pour l’histoire et la culture landaises.
Il devient président d’honneur la Société de Borda, titulaire de l’Ordre national du Mérite et chevalier de la Légion d’honneur en 1991. Une rue de Capbreton porte son nom.
Il est décédé le 3 octobre 1996, à l’âge de 101 ans.
Sources :
Archives départementales des Landes, de la Gironde et des Pyrénes-Atlantiques
https://www.cotesud-histoire.com/templates/cotesud-histoire.php?id_page=20