Dès la Libération, les groupes de résistants procèdent à de nombreuses arrestations de suspects de collaboration avec les Allemands ou avec les autorités de Vichy. L’épuration commence sous les auspices des comités de Libération et des groupements de la Résistance. Elle se poursuit sous l’impulsion de la Commission d’épuration, de la Commission de confiscation des profits illicites, puis des pouvoirs publics.
Lors du premier mois, l’instruction des dossiers et les arrestations sont confiées au service des Renseignements généraux, secondés par la police FFI composée d’éléments souvent inexpérimentés.
Face à l’urgence et l’ampleur de la tâche, les premières semaines sont marquées par un certain flottement en ce qui concerne les internements.
Les premiers internements, ordonnés (ou régularisés) par le préfet (qui est encore Gazagne) sur proposition du Comité Départemental de Libération, ont lieu dès le 21 août, jour de la Libération de Mont-de-Marsan. 23 suspects considérés comme les plus compromis sont arrêtés en deux jours par les FFI, internés à la maison d’arrêt, puis transférés à « Villeneuve » (de-Marsan) le lendemain. On compte au total plus de 80 internements à la prison jusqu’à la fin du mois d’août, 44 en septembre, 18 en octobre, puis le chiffre tombe en dessous de 10.

La procédure
Par arrêté du 9 septembre 1944, le commissaire régional de la République Gaston Cusin ordonne la création dans chaque département d’une « Commission consultative chargée de donner son avis sur le maintien des internements administratifs », saisie uniquement pour les internements, et en aucun cas pour les affaires comportant des poursuites pénales ; elle ne peut pas non plus ordonner d’enquêtes.
Le 12, la Commission d’Épuration du Comité Départemental de Libération décide la création d’une commission restreinte des internements, composée de deux résistants et deux « conseillers techniques », à savoir un magistrat et un inspecteur de la police spéciale.
A la fin du mois, un arrêté du Commissaire régional de la République modifie la composition de cette commission (renommée « Commission d’examen des internements administratifs ») : elle est présidée par le Procureur de la République de Mont-de-Marsan, et comporte 2 membres nommés par le C.D.L. et 2 autres nommés par le Commissaire de la République (un résistant et un avocat).
Elle est enfin rebaptisée en décembre : «Commission de vérification (alias de révision) des internements».
On reproche la lenteur des travaux de cet organisme, les difficultés d’enquêter (manque de personnel)…
Les listes de condamnés sont publiées dans la presse (le communiste résistant Feugas veut même publier la liste des détenus et des arrestations).
Voici les étapes de la procédure :
- Les Comités de Libération locaux ou gendarmes gardent à vue les suspects (si besoin) et constituent les dossiers
- La Commission d’épuration examine les dossiers et les transmet aux différents organismes compétents : au préfet ceux qui doivent être remis à la Commission des Internements administratifs ou à la Chambre Civique, au Commissaire du Gouvernement auprès la Cour de Justice (qui fonctionne à partir de fin octobre) les dossiers de sa compétence, à la Commission de confiscation des profits illicites…
- L’inspecteur de Police auprès la Commission des Internements instruit les dossiers (enquêtes, témoignages, etc.)
- A l’issue de l’instruction, le président de la Commission des Internements informe l’accusé et son avocat des faits reprochés. La Commission juge dans les 8 jours (en théorie), au vu du dossier et du mémoire de défense, et demande au préfet les arrêtés d’internement ou d’assignation à résidence.
En février 1945, le Ministre de l’Intérieur doit néanmoins rappeler l’objectif des internements administratifs (et assignations à résidence) : ils n’ont pas vocation à punir les collaborateurs ni à suppléer à des mandats de dépôt, mais à « mettre hors d’état de nuire les individus dangereux pour la Défense nationale ou la sécurité publique ».
Pour illustrer cette distinction, on peut citer l’exemple du dossier de Robert L., inculpé de dénonciation. Ayant bénéficié d’une décision de classement, le Procureur de la République demande au surveillant-chef de la maison d’arrêt de l’élargir « s’ils n’est détenu pour autres cause», mais le préfet demande de le réinterner au camp (l’intéressé ayant « fait l’objet d’une décision d’internement jusqu’à la fin des hostilités »), et renvoie le dossier au parquet afin de le déférer devant la Chambre Civique (avril 1945).
Le dernier PV de la Commission des Internements que nous avons pu retrouver date du 25 octobre 1945, mais on constate que plus on avance dans le temps, plus les autorités supérieures (préfets, procureurs, commissaire régional de la République) prennent la main sur les décisions d’internement.
Le bilan s’établit ainsi : 1365 dossiers examinés, 497 classés, 776 proposition de mesure administrative : 1/3 internés (de 15 jours à 1 an, ou « jusqu’à la fin des hostilités »), 1/6e astreintes à résidence dans leur commune, ou à 50 km, ou hors du département. Le reste des dossiers est transmis au Parquet ou à la gendarmerie pour complément d’enquête, ou bien les prévenus sont en fuite. 1/10e des dossiers sont transmis à la Commission des profits illicites (commerçants, négociants, etc.).
Ce sont au total plus de 600 personnes qui ont été internées au Centre de Séjour Surveillé entre la Libération et sa fermeture définitive le 29 juin 1945.
Les internés du lycée ont été arrêtés par les FFI (de Mont-de-Marsan, Villeneuve, Aire, St-Sever, St-Paul-en-Born, Mimizan, Eugénie, Poyanne), ou bien « sur ordre de M. Léon », par la Police spéciale de Mont-de-Marsan, la gendarmerie (de Labouheyre, Montfort, Port-de-Lanne, Gabarret, Pau), par le « Groupe Police du lycée » (?), le Service Spécial Militaire, la Sécurité Militaire, ou bien sont transférés depuis la maison d’arrêt de Mont-de-Marsan (ou de Dax). Sont également internés des soldats allemands évadés du camp de Sore.
Les plus jeunes internés semblent être Gérard Le Breton (libéré le 26/11) et René Larrieule (sympathisant de la Légion des Volontaires Français), âgés de 15 ans ½, alors que la plus âgée est Marie Dupoy de Guitard, 86 ans (libérée le 9/11).
Les motifs d’internement ont trait essentiellement à la Collaboration « directe » (« Auteur d’opérations contre le maquis », « Waffen SS », « Agent de la Gestapo », « Interprète de la Gestapo de Mont-de-Marsan », « Intelligence avec l’ennemi », « Propagande pour le STO », « Propagande allemande », « Délégué à la propagande », « Dénonciations calomnieuses aux Troupes d’Occupation », « Trafic avec les Troupes d’occupation », « Sentiments pro-allemands », « Germanophile », « Volontaire pour l’Allemagne »), à l’appartenance à un organisme collaborationniste : « P.P.F., écrit dans l’Assaut », « Accointances avec la Milice », « Epouse d’un franc-garde de la Milice », « agent recruteur de la Milice », « membre de la LVF », « Sympathisant L.V.F. », « membre du R.N.P. », « Membre du Groupe Collaboration », « ex-speaker de Radio-Paris »…
On trouve aussi les plus imprécis « Suspect », « Suspecte », « Très suspect », « Attitude suspecte », « Attitude douteuse », « Menées anti-nationales ».
Est également évoqué le marché noir (« Marché noir, abattage clandestin », « Stocks allemands non déclarés », « Hausse illicite »).
Il y a enfin des motifs liés à la Libération elle-même et au rétablissement de la légalité républicaine (« Port illégal d’arme », « Branchement clandestin de ligne téléphonique », « Injures aux FFI », « Outrages aux FFI », « Injure à la police FFI »…).
Les sorties correspondent à des libérations (sur ordre du préfet, ou de la Sécurité Militaire), des mises en résidence forcée, des transferts à la prison de Mont-de-Marsan (et à la prison de Bayonne, au Fort du Hâ à Bordeaux, etc.) ou bien encore à l’hôpital (Mont-de-Marsan et Dax). Les Allemands sont quant à eux transférés à la caserne Bosquet.
On peux prendre l’exemple du « dossier » de Jean Biremont, berger à Rion-des-Landes, accusé de dénonciation d’un parachutage pour la Résistance, arrêté le 16 mars 1945, interné à la maison d’arrêt pendant un mois et demi sur mandat du Commissaire de la République auprès de la Cour de Justice, et finalement acquitté cette même Cour le 2 mai. Le 15, le préfet ordonne sa libération.
Les lieux d’internement
Dans l’urgence, les premières personnes arrêtées sont détenues à la maison d’arrêt de Mont-de-Marsan, mais cette situation ne peut être que provisoire, un interné n’étant pas un détenu (qui ne peut l’être qu’en vertu d’un mandat de dépôt ou d’arrêt, dont la délivrance est une prérogative du préfet et du commissaire de la République).
Un « Camp d’internement » (les appellations sont variées : « Centre d’internement », « Centre d’internement administratif », « Camp administratif »), est alors installé au lycée (évacué par les Allemands une semaine plus tôt, il est dans un état de dégradation avancé) pour recevoir les personnes internées qui purgent une peine mineure ou qui sont en attente d’un jugement. Il semble avoir ouvert dès le 28 août (voire le 26).
Le directeur est M. Lapoux, remplacé par M. Séris, né en 1910, commis des Postes, résistant, en fonction à compter du 1er novembre, et il est secondé par un gestionnaire et un dépensier. Il y a six plantons «européens», tandis que la garde du camp est assurée par des tirailleurs sénégalais, récemment libérés des camps de prisonniers de guerre allemands.
Dès le 4 septembre, le Comité Départemental de Libération propose l’ouverture d’un « camp de concentration », localisé route de Bayonne, ou bien route de Sabres (locaux d’A.V.L., on y mettra finalement les soldats Italiens de la Caserne Bosquet), au camp de Mestade à Aire, au camp du Basta à Buglose, ou bien à la prison d’Eysses (à Villeneuve-sur-Lot). Mais Charles Lamarque-Cando insiste pour qu’il n’y ait qu’un seul camp, situé à Mont-de-Marsan. On prévoit une capacité de 500 personnes, et on demande que ce soit la Commission d’épuration qui prononce les internements. La garde devra être assurée par des Tirailleurs Sénégalais ou des FFI.
Dans son rapport du 25 septembre, le lieutenant Puchulu (résistant au Corps Franc Pommiès), pressenti pour l’organiser, recommande de choisir le camp de la route de Sabres.
Finalement, la Commission d’épuration (présidée par le communiste Vital-Gilbert, avec un représentant du préfet, un inspecteur de la police spéciale et un magistrat comme « conseiller technique ») décide la création, fin septembre 1944, d’un « camp de prévention », où devront être assemblés tous les détenus (en préventive donc, avant examen de leur situation). La aussi, diverses appellation sont utilisées : « Camp alias Centre d’internement administratif », puis « Centre de Séjour surveillé ».
On compte 3 fois plus d’internés hommes que femmes.
Le 27 septembre 1944, la Commission demande le transfert à Mont-de-Marsan des 29 détenus de la maison d’arrêt de Bayonne. A Dax, la prison a reçu ses premiers détenus dès la nuit de la Libération, le 22 août. Ils vont y rester plus de deux mois. Les transferts des détenus de Dax et Bayonne sont en effet effectués le 28 octobre (68 détenus). On garde à Dax en cellule les cas les plus graves.
Avec l’arrivée des internés de Dax et de Bayonne, il devient urgent d’ouvrir le camp de la route de Bayonne.
Les travaux prennent du retard, les matériaux manquent, toutes les canalisations et clôtures sont à refaire (frais totaux : 130.000 francs environ), «une cinquantaine d’ouvriers, dont 25 prisonniers italiens travaillent journellement pour le [nouveau] camp d’internement».
Les travaux, supervisés par une autorité militaire qui a d’autres priorités, traînent… La préfecture reprend alors le dossier.
Le Camp « de Rigole », situé 14 route de Bayonne, ouvre enfin le lundi 27 novembre 1944. C’est un terrain d’un peu plus d’un hectare, touchant au sud à la voie de chemin de fer de Morcenx. Le terrain de la route de Bayonne appartient à MM. Théophile Benoist, 109 avenue Jean Jaurès à Aubervilliers et Bernadet (Mont-de-Marsan). Réquisitionné le 5 septembre 1940 par les Allemands pour servir de cantonnement, puis de camp de prisonniers de guerre (« coloniaux »), il est évacué le 21 août 1944.
Le camp comporte une quinzaine de bâtiments/pièces : 5 baraques de détenus, poste de garde, salle de garde, bureaux, entrepôts, infirmerie, cuisines, sanitaires, chapelle, salle de visites, menuiserie…. Il est prévu pour une capacité de 400 internés (ce qui fait 80 par baraque, mais les hommes sont bien entendu séparés des femmes, en principe…).
Les 294 détenus sont transférés depuis le lycée par autocar.
On commande le même jour 370 couvertures en laine.
Le personnel se compose d’un chef, un gestionnaire, une dactylo, quatre gardiens, une vaguemestre, une cuisinière, sept surveillantes, un médecin. La surveillance est assurée par deux brigadiers de police, 10 gardiens policiers (puis 12 gendarmes) (surveillance intérieure), puis à partir du 23 mars (« le peloton du CSR étant rappelé d’urgence à Bordeaux »), par un brigadier militaire et 12 (puis 18) gardiens militaires (du 34e), des Tirailleurs Sénégalais (surveillance extérieure).
Au 30 novembre, selon le préfet, le département compte 344 détenus (294 au camp et 50 à la prison).
Après le transfert de 19 détenus depuis la maison d’arrêt, l’effectif du camp culmine à 324 entre le 9 et le 12 décembre.
De nouveaux internements, toujours en décembre, concernent surtout des affaires de marché noir, et à la fin de ce mois, étant donné les conditions de surveillance défectueuses à la prison de Dax (manque de gardes), les détenus de cet établissement sont transférés au Centre de la Route de Bayonne (sauf D…, considéré comme dangereux, incarcéré à la maison d’arrêt de Mont-de-Marsan).
Mais de nombreuses libérations (assorties de résidences forcées) interviennent, et le nombre d’internés va décroître régulièrement jusqu’à la fermeture fin juin 1945.
La vie à l’intérieur du camp
Il y a des évasions (un évadé, repris, est transféré à la prison). Se pose également la question des colis, de la correspondance (supprimés fin octobre), des appels téléphoniques, des visites, des avocats,etc.. On signale que des individus viennent compulser (et voler ?) des dossiers au lycée. Le préfet est averti qu’il y a des hospitalisations à abusives, et un nouveau médecin du camp est nommé.
A la maison d’arrêt, Jacques M…, agent français de la Gestapo, à la veille de comparaître devant la Cour de Justice pour intelligence avec l’ennemi, tente de se suicider en avalant le manche d’une cuillère (il sera condamné à mort, mais sa peine commuée).
Le 1er novembre, à la prison de Dax, un prévenu est durement interrogé par les résistants Augé et Ferrand, ce qui suscite une forte réprimande de la part du préfet, qui en informe Léon des landes.
La discipline intérieur du Centre semble pour le moins relâchée. Ainsi fin novembre au lycée,
«la surveillance des couloirs et des paliers des hommes et des femmes est inexistante, il en résulte un désordre quasi-permanent […]. Des femmes de moralité douteuse n’hésitent pas à user de leurs charmes auprès de leurs surveillants pour en obtenir tout ce qu’elles désirent».
Le directeur du centre demande de remplacer les plantons les plus jeunes, « les propositions alléchantes des détenues ne manquant pas ».
Le détenu D… peut converser avec sa femme au Bar des Usines, rue de Nonères, alors qu’une corvée de 15 hommes est retournée chercher du matériel au lycée.
Le lendemain de l’ouverture du nouveau camp de la route de Bayonne, une inspection (nocturne) diligentée par le Comité Départemental de Libération, découvre le planton de service dans le lit d’une détenue (« habillé mais sans chaussures ») !
Début décembre, le directeur du Centre de Séjour Surveillé se plaint de la surveillance défectueuse des gardes FFI et réclame qu’ils soient remplacés par les gardes mobiles qui doivent arriver, et qui pourraient « encadrer avec autorité la garde sénégalaise ».
Cependant en janvier 1945 les Renseignements Généraux signalent un trafic de colis et lettres, couvert, moyennant finances, par ces mêmes G.M.R. (Gardes Mobiles Républicains), et certains sont découverts, de nuit, dans le quartier des femmes…
Enfin le commissaire des Renseignements Généraux signale un projet d’évasion, fomenté par des miliciens, et recommande de les transférer à la maison d’arrêt…
Les conditions de détention semblent correctes, comme en témoignent les rations alimentaires distribuées, mais une inspection révèle que certains baraquements sont envahis de parasites (pénurie de chlorure de chaux et fermeture prochaine du camp).
Les visites sont interdites sauf pour les condamnés (au parloir)., mais certains internés bénéficient de permissions, pour des évènements familiaux, ou pour recevoir des soins médicaux par exemple.
Vers la fermeture du camp
Suite à une instruction du Commissaire régional de la République, et afin de « décongestionner » les camps d’internement, fin mars, 22 internés sont transférés au camp de Gurs (ceux frappés d’une peine supérieure à 10 mois) et à la prison d’Eysses en Lot-et-Garonne (ceux qui étaient incarcérés à la maison d’arrêt et condamnés à une peine supérieure à un an).
Tout au long des mois de février et mars, les effectifs du camp diminuent fortement, et entre fin mars et juin 1945, la Base Aérienne naissante récupère tous les lits, matelas et traversins (plus de 360).
Comme tous les autres camps d’internement, le camp de la route de Bayonne ferme, et le 29 juin 1945, les 26 hommes et 5 femmes restants sont transférés aux camps de Gurs (hommes) et Eysines (femmes). Le camp est liquidé le 30 (restaient 6 femmes et un homme). Le lycée récupère alors les matelas lui appartenant, qui sont dans un piteux état….
Le paiement des frais d’internement est ensuite réclamé aux détenus libérés (solvables).
Mi-août, deux militaires gardent toujours le camp vide.
En septembre, on signale le prêt de tables et bancs aux Jeunesses Socialistes, ou bien aux Colonies de vacances des Landes. Du matériel part également à la préfecture.
A partir de la fin 1945, le camp accueille le Dépôt 186 des prisonniers de guerre de l’Axe, transféré depuis Labouheyre (il est géré par les autorités militaires, qui proposent au propriétaire de transformer la réquisition en bail). Les prisonniers sont employés au déminage, ou bien dans des entreprises du département.
Un rapport du « Secours Quaker » (American Friends Service Committee) nous donne une photographie du camp à cette date :
SECOURS QUAKER BO/MLF le 12 juin 1946
Délégation de Toulouse
CAMP DE MONT-DE-MARSAN
Visite de Stanley Johnson et Toot Bleuland, avec le Dr Bulliot de la Croix-Rouge internationale le 23 mai 1946
Transfert de Labouheyre
Le dépôt 186 commandé par le capitaine Jost, a été transféré de Labouheyre à Mont-de-Marsan.
Il ne reste qu’une poignée de prisonniers à Labouheyre.
Le terrain de Mont-de-Marsan étant réquisitionné, doit être rendu au propriétaire prochainement.
Le capitaine Jost s’inquiète beaucoup car on veut transférer le dépôt dans une vielle caserne mal commode et sale. Il a fait des démarches pour que le camp reste dans le terrain réquisitionné et a signalé que les frais de transfert s’élèveraient à plus de 230000 francs, c’est-à-dire plus du montant du loyer pour 30 ans du terrain réquisitionné.
Le Dr Bulliot de la Croix-Rouge internationale qui est arrivé dans le camp quelques minutes après nous, a téléphoné à la Croix-Rouge internationale à Paris pour essayer d’éviter le transfert proposé.
Rapatriement
On attend un rapatriement de presque 600 prisonniers dans deux semaines.
Baraques
Nous avons visité plusieurs baraques. Elles sont en bois et beaucoup plus claires que les baraques de Labouheyre.
Les baraques sont rangées autour de deux cours ou champs carrés larges d’environ 50 mètres.
Literie
Les prisonniers de guerre se couchent dans des châlits superposés en bois, exceptés à l’infirmerie où les lits ont des sommiers métalliques.
Il y en a très peu qui manquent de matelas ou de paillasses et tout le monde a deux couvertures.
Douches
Les douches à eau chaude fonctionnent régulièrement et d’après le chef de camp, les aménités sont pour beaucoup d’hommes, bien mieux que chez eux.
Malades
Il n’y a que 18 malades alités. Le médecin allemand a signalé un manque de pommade et il n’y a pas d’insuline.
Dentiste
Il y a un dentiste qui travaille dans le camp et le Dr Buillot a offert de mettre à sa disposition une trousse complète portative, si le commandant peut le laisser circuler parmi les commandos.
Cantine
Nous étions agréablement étonnés de voir la belle installation de la cantine. Il y avait une variété de marchandises beaucoup plus grande que celle que nous avons vue dans les autres camps. Par exemple, il y avait des cuillères, des fourchettes, des raisins secs, des citrons frais, des boîtes de conserve de porc, des jeux de cartes, des matériaux d’artiste, etc.
On nous a dit que la cantine a dépensé 200000 francs pour le mois, pour ces marchandises.
Atelier de réparation
Le cordonnier possède un peu de cuir mais il manque (comme toujours) des aiguilles, du fil de lin, des clous et des fers.
Le tailleur a une machine à coudre, mais il lui manque des aiguilles, ainsi que du fil et de la craie.
Impression générale
Nous avons bien l’impression que le capitaine Jost s’est donné beaucoup de peine pour faire installer le camp comme il faut pour que les relations entre les prisonniers de guerre et les Français soient excellentes et ce serait très regrettable si on devait de nouveau transférer le camp comme proposé.
Délégué, C BLEULAND Stanley JOHNSON
Comme les autres camps de prisonniers de guerre allemands, il est dissout le 1er juillet 1948, et les 585 détenus sont transférés au Dépôt 171 (Camp des Sables à Portet-sur-Garonne près de Toulouse)..
Dès 1960, le camp est devenu la Cité Benoît (HLM).
Autres documents
Sources :
Archives départementales des Landes
http://memoiredeguerre.free.fr/pga/camps-francais/rapports-quaker/mont-de-marsan.htm#deb d’après American Friends Service Committee Records Relating to Humanitarian Work in France, 1933-1950. Séries II TOULOUSE OFFICE. Sub-series: REPORTS Box 26 Folder 19. American Friends Service Committee 1501 Cherry Street Philadelphia, PA 19102
Schemmel (J.) et Houpeau (P.), Arbeitskommando. Des barbelés à Buglose, 2018, Ed. Société de Borda