La Résistance dans les Landes

Balbutiante à ses débuts, la résistance dans les Landes ne cesse de se structurer. À la fin de l’année 1943, elle devient une force crédible et peut envisager de véritables actions militaires ou de sabotage. En 1944, elle joue un rôle important dans la libération du département (plus de détails après les biographies).

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Morts au combat Justes

Les premières actions

Les premières réactions sont spontanées, individuelles et désordonnées

Bien peu, parmi celles et ceux qui refusent de capituler, sont préparés à une lutte clandestine. Ce sont des hommes, des femmes, des adolescents qui n’écoutant que leur conscience veulent faire quelque chose. Combattre, aider, renseigner mais surtout ne pas se résigner. Il n’existe pas de « professionnels » de la Résistance.

Quelque uns décident de quitter la France pour s’enrôler dans l’armée britannique qui continue de se battre sans même avoir entendu le discours d’un général français, à la radio de Londres, le 18 juin 1940. Il faudra que ce discours soit répété tous les soirs pour que le nom du général de Gaulle soit enfin connu. Les Landais Georges Bergé et Bernard Crouzat le rejoignent à Londres. D’autres restent et entreprennent des actions individuelles qui sont autant d’actes de résistance, même s’ils sont totalement improvisés. Parfois des individus s’attaquent à des Allemands isolés ou en petits groupes sans en avoir mesuré toutes les conséquences, comme à Bostens en septembre 1940. Plus tard, parmi ceux qui refusent la défaite, quelques-uns s’en prennent à des Français qui collaborent avec l’occupant comme ces jeunes montois, briseurs de vitrine. D’autres mettent des inscriptions contre l’occupant ou déchirent des affiches de propagande, ou indiquent à un prisonnier évadé le chemin à suivre, ou même le cachent…

Le général de Gaulle

Lorsqu’il lance l’appel du 18 juin 1940, le général de Gaulle est un inconnu pour la grande majorité des Français, malgré sa nomination au poste de sous-secrétaire d’Etat à la défense quelques jours plus tôt. Peu à peu grâce à ses discours à la BBC puis à l’action des FFL et de la Résistance intérieure qui reconnaît son autorité, il devient le symbole de la Résistance française aux côtés des Alliés.

Dans les Landes, dès le 18 septembre 1940 des papillons marqués « Vive De Gaulle » sont collés à Dax dans des lieux publics, sur les poteaux télégraphiques et électriques.

A partir de 1941, les inscriptions sont plus nombreuses. On en trouve à Peyrehorade, à Soustons …et surtout à Dax. Les « Vive De Gaulle » sont souvent accompagnés de Croix de Lorraine, de « Vive Churchill » et « A bas l’Allemagne » ou « A bas Hitler ».

En janvier 1941, l’armée allemande appose 2 600 affiches de propagande à Dax. Elles sont lacérées ou surchargées d’inscriptions en faveur de De Gaulle. Pour les autorités locales qui veulent minimiser l’affaire, il s’agit « d’actes isolés de collégiens plus que de partisans de l’ex général ».

De Gaulle devient alors plus qu’un nom, plus qu’une voix lointaine qui apporte l’espoir de la victoire et de la libération. Il personnifie l’honneur de la France qui a été bafoué par Pétain et le régime de Vichy.

Les dissimulations d’armes et de matériel

Roger Tronche, ingénieur-chef de la base de Biscarrosse, chargé de diriger les montages et les essais des hydravions Late 298, destinés à l’aéronavale française, prend l’initiative de faire passer en zone libre, tout ce qu’il peut soustraire à la réquisition. Partirent notamment, à destination de la division de contrôle de Toulouse, dix ensembles de postes-radios Ponsot, des appareils de navigation, des caisses d’outillages spéciaux…etc. A l’usine Ratier à Figeac, j’expédiai deux hélices Ratier de Late 298, et, à l’école de D.C.A. de Metz, repliée à Aire-sur-l’Adour, six canons Hispano-Suiza de 20mm, avec chargeurs et munitions, provenant des Bréguet 690…

Les tracts

La rédaction des premiers tracts en octobre 1940.

Alfred Moulian, métayer à Saint-Jean-de-Marsacq et membre de l’Organisation Spéciale du Parti communiste, est l’un des premiers landais à rédiger un tract pour faire réagir ses concitoyens en les invitant à s’opposer au racisme et à la suppression des libertés. Dans ce document, il dénonce le pillage de l’économie française par les troupes d’occupation et la collaboration du gouvernement pétainiste avec les nazis.

A Boos, René Dupau, cultivateur et membre de la Jeunesse communiste, rédige un tract dans la même veine que celui d’Alfred Moulian, pour faire réagir les paysans du canton. Ici, le tract est reproduit à cinquante exemplaires avec l’aide de Gilbert Dupau à Carcen-Ponson. Ce dernier a réussi à sauver de la perquisition policière cette machine appartenant à l’U.J.A.F. lors de la dissolution de cette organisation, en septembre 1939.

29-30 août 1943 : tracts à Roquefort

Alors qu’elle occupe un poste de secrétaire-comptable aux papeteries de Roquefort, le jeune Hélène Remazeilles, se voit proposer par un nouveau venu embauché dans l’entreprise, de travailler pour la Résistance. Elle accepte aussitôt avec enthousiasme. Il lui demande de taper en plusieurs exemplaires un tract qui incite les jeunes gens appelés pour le Service du travail obligatoire en Allemagne (STO), à refuser de partir. Elle en fait une douzaine qu’elle borde d’un trait bleu et rouge prenant ainsi pour symbole les trois couleurs du drapeau français.

Elle se charge elle-même de la distribution sans en parler à ses parents. Auraient-ils accepté ? Il est dangereux de se promener la nuit, sur les routes après le couvre-feu qui débute à 22 heures 30 !

Une fois toute la famille couchée, elle quitte sa chambre, située au rez-de-chaussée, par la fenêtre et part sur son vélo, sans lumière, pour une tournée d’une trentaine de kilomètres. Dans chaque village, elle placarde les tracts à l’aide de punaises sur des portes de maisons ou des arbres. Sur le chemin du retour, à Roquefort, elle entend des voix et les bruits de bottes d’une patrouille. Elle se faufile dans la ruelle qui se trouve à sa droite, dissimule son vélo derrière un petit cabanon, pousse violemment la porte et s’engouffre à l’intérieur. Ce sont des WC ! Après une longue attente, elle sort prudemment, placarde rapidement les deux derniers tracts, rejoint son domicile, enjambe la fenêtre et retrouve la quiétude de sa chambre. Après une nuit durant laquelle elle a peu dormi, elle se rend le lendemain matin au travail. Tout le monde ne parle que de l’événement. « Des résistants sont passés à Roquefort et ont affiché des tracts. »

La guerre des symboles

La bataille des « V »

En mars 1941, les Français Libres lancent depuis la BBC, à Londres, la campagne des V (V comme victoire) : « Tracez des V sur tous les murs…C’est un moyen de manifester votre espoir sans courir aucun danger ». Si cette manière de manifester contre l’occupation et la collaboration rencontre un vif succès en raison de sa simplicité elle n’est pourtant pas sans risque. Victor Le Bigot est, dans les Landes, le premier condamné pour avoir, en mars 1941, dessiné des V sur les murs de la ville de Mont-de-Marsan. Il écope de trois mois de prison pour « inscription antinationale ».

Le 24 avril, à Soustons des V sont inscrits sur certaines portes et fenêtres et à l’urinoir public. Une enquête est ouverte et près de 50 personnes sont entendues. Les V étaient encadrés de « Vive de Gaulle », « A bas l’Allemagne », « Victoire à l’Anglais », « A bas Hitler ».

Début mai à Dax, des V sont écrits à la craie « par des enfants ou par des maniaques dans des vespasiennes » selon le rapport du sous-préfet au major Cadenbach. Deux jeunes de 17 et 19 ans sont arrêtés pour avoir inscrits des V sur les bornes kilométriques entre Peyrehorade et Cagnotte

Finalement les troupes d’occupation trouvent la parade : en juillet 1941, ils inscrivent des V décorés sur les bâtiments occupés par les services allemands ainsi que sur leurs voitures pour glorifier l’avance rapide de leurs troupes en URSS.

Pour les jeunes opposants français, la Croix de Lorraine remplace le V : « la guerre des symboles » continue.

La Croix de Lorraine

La Croix de Lorraine est choisie comme emblème par le général de Gaulle. Elle devient très vite un symbole patriotique et combattant aussi facile à tracer que les V. Elle est utilisée dès 1940 pour montrer l’espoir d’une victoire future et la solidarité avec les Français Libres qui combattent aux côtés des Anglais. En 1943, la Croix de Lorraine devient le symbole de l’unification de la Résistance sous l’autorité du général de Gaulle.

Dans les Landes, la première inscription d’une Croix de Lorraine tracée au charbon est signalée en mai 1941 sur les murs de Peyrehorade aux côtés des mentions « Vive De Gaulle, Vive Churchill ». A partir de l’été 1941, les inscriptions de Croix de Lorraine se multiplient à partir du moment où les troupes allemandes ont repris ce symbole à leur compte.

Les manifestations

La presse locale relaye quotidiennement les faits divers qui sont dirigés directement contre le gouvernement ou l’armée allemande, à l’image du début de l’année 1942.

Ces « malfaiteurs » ne seront pas identifiés et donc pas inquiétés. Cela leur permet sans doute de franchir un pas supplémentaire dans la lutte clandestine. Ils sont trois, ils sont élèves au Lycée Victor Duruy et ils se nomment Marc Cazaux 18 ans, Jean Lemercier 18 ans et demi, Marcel Dupouy 17 ans et demi.

Marc Cazaux est exclu du lycée le 1er juin 1942. Il est dénoncé par un de ses professeurs suite à son refus de se lever et de chanter l’hymne national du régime de Vichy : « Maréchal nous voilà » aux arènes de Mont-de-Marsan lors de la commémoration de la fête des mères. Il s’évade de France par la frontière espagnole avant d’être arrêté le 20 novembre 1942, par la police espagnole. Il est interné à la prison de Pampelune puis au camp de Miranda jusqu’au 17 mai 1943 et arrive à Casablanca au début du mois de juin. Sorti aspirant de l’école des officiers il est affecté au 8ème régiment de tirailleurs marocains et participe aux campagnes d’Italie, de France et d’Allemagne. Marcel Dupouy s’évade de France par l’Espagne le 20 novembre 1942, rejoint Gibraltar puis l’Angleterre et s’engage dans les FFL. Admis à l’école des cadets il en sort aspirant. Il est parachuté en Bretagne et participe aux campagnes de France et d’Allemagne. Jean Lemercier rejoint en 1944 le Bataillon de l’Armagnac.

Le 14 juillet est l’occasion de manifestations patriotiques, à Soustons, organisées par le groupe FN-FTP dirigé par Maurice Desbieys, à Saint-Vincent-de-Tyrosse, à Saint-Jean-de-Marsacq, à Saint-Martin-de-Hinx ou encore à Sainte-Marie de-Gosse.

L’aide aux personnes pourchassées

L’aide aux personnes pourchassées est l’une des missions de la Résistance. Outre les Juifs et les réfractaires au Service du travail obligatoire (STO), elle concerne aussi les soldats et aviateurs alliés cherchant à échapper à la capture tout comme les résistants en fuite.

Les Evadés de France

De 1940 à 1944, de nombreux Français décident de tout quitter, de rompre complètement avec leur environnement familial, professionnel et avec leur pays pour participer, en soldats, à la lutte pour la libération de la France. Leur combat commence par le franchissement les Pyrénées au péril de leur vie car il faut affronter la montagne et ses itinéraires longs et éprouvants. Beaucoup renoncent devant ces difficultés. La moyenne d’âge de ceux qui réussissent le passage se situe autour de 25 ans.

Les Landes ont été traversées par bon nombre de ces Français désireux de quitter la France car le département est une voie de passage naturelle sur la ligne de démarcation très proche de la frontière espagnole.

De plus, de nombreux Landais ont aussi tenté de franchir les Pyrénées pour rejoindre les unités de la France combattante. Beaucoup ont échoué, certains ont réussi comme Bernard Crouzat, Alfred Daudon, Robert Malet, ou mesdames Chivrac et Andrieux…

La création spontanée d’une filière d’évasion de prisonniers de guerre

Les prisonniers de guerre originaires d’Afrique, internés au camp de prisonniers de Rion-des-Landes rattaché au Stalag 122, sont employés en forêt à l’abattage des pins, ce qui facilite les tentatives d’évasion.

Avec la complicité d’Emile Léglise et de Pierre Brocas, des prisonniers de guerre réussissent à s’évader. Après avoir revêtu des vêtements civils, ils sont dirigés vers la zone occupée dite zone libre, par Beylongue, Saint-Yaguen, Meilhan.

La filière est découverte à la suite d’une dénonciation, et huit patriotes sont arrêtés par la police allemande entre le 30 juin et le 7 juillet 1942 : Emile Léglise Pierre Brocas et Maurice Filloles à Rion des Landes ; Julien Daverat et Félix Ducam et René Brazeilles à Beylongue ; Henri Pendans et André Lanibois à Saint-Yaguen.

Le tribunal militaire allemand condamne sept d’entre eux à 18 mois de forteresse. Ils sont déportés en Allemagne et internés le 19-11-1942 à la prison de Bernau en Haute-Bavière. André Lanibois est interné à la prison de Villeneuve Saint Georges.

Hébergement et fabrication de faux papiers

Albert Marmande et Jacques Miremont, membres de la jeunesse communiste clandestine, sont responsables d’un groupe FN-FTP très bien structuré dans le secteur de Saint-Martin-de-Hinx.

Ils s’occupent notamment de la fabrication de fausses cartes d’identité, avec le cachet de la mairie de Saint-Martin-de-Hinx, pour les résistants vivant dans la clandestinité, par exemple, pour Georgette Roch, agent de liaison.

Jacques Miremont, Albert Marmande et son père, Jean Marmande, sont arrêtés le 20 septembre 1942 et incarcérés au Fort du Hâ, quartier allemand à Bordeaux.  

Déporté au camp de concentration de Sachsenhausen avec son père le 23 janvier 1943 sous le matricule 58581, Albert Marmande est porté disparu. La dernière lettre que sa mère a reçue était datée du 8 août 1944. Jean Marmande, matricule 58580, transféré le 6 février 1945 à Buchenwald, matricule 31473, a été abattu d’une balle dans la tête par une sentinelle SS à Pösing (Bavière) le 23 avril 1945 lors de la marche de la mort.

Franchissement de la ligne de démarcation

Il est difficile de citer ici toutes celles et ceux qui ont pris des risques immenses pour permettre aux candidats à l’évasion d’avoir un espoir de réussite. Beaucoup de ces frontaliers ont aidé sporadiquement ou plus fréquemment, lorsqu’ils œuvraient dans le cadre de véritables filières d’évasion, des résistants recherchés par les autorités allemandes ou vichyssoises, des pilotes alliés abattus, des Juifs …et ce de la façon la plus anonyme et la plus désintéressée. D’autres dans les mêmes circonstances n’ont pas eu de scrupule à monnayer leurs services sans toutefois garantir le succès de l’opération…

Les situations de Madame Henriette Lauraye, de Saint-Pierre-du-Mont, ou de la famille Croharé, à Roquefort, apportent un éclairage intéressant sur les modes opératoire dans ce secteur.

« J’ai à l’époque 16 à 17 ans et j’habite à la ferme Peyrican. Le jardin de la ferme est juste à la limite des deux zones. Les passages se font surtout par le bois appelé à Baqué, dépendant de la ferme de Garderon. De nombreuses patrouilles circulent sur la route de Saint-Sever et surveillent depuis le point culminant ou se trouve actuellement la déviation sur Dax. Les deux fermes Garderon et Pérican se trouvent du côté de la route de Grenade par rapport à la route de Saint-Sever. Mais ce n’est pas seulement à cet endroit que se font les passages entre les deux zones. De nombreux frontaliers aident les gens qui fuient la zone occupée ».

Henriette Lauraye.

A quelques kilomètres plus au nord, la famille Croharé habite en zone occupée rue de l’Eglise. Pour se rendre à son travail, muni d’un laissez-passer, (Ausweis), M. Croharé passe matin et soir le contrôle du pont de Roquefort. Derrière la maison, un jardin domine la rivière et un petit chemin en escalier donne accès à la berge. C’est par ce passage qu’Hubert Croharé sort la nuit pour remplir des missions. Il est l’un des maillons d’un réseau d’évasion, vers l’ancienne zone libre, réseau qui part du Nord de la France, qui passe par Lencouacq, Sarbazan, Geaune, Samadet, Hagetmau, Amou, en direction d’Orthez et des Pyrénées.

Cette délicate opération nécessite un maximum de prudence et de discrétion. C’est pour cela que les enfants sont séparés de leurs parents à l’approche de la ligne de démarcation. L’arrivée d’une famille entière tentant de la traverser au même poste de garde aurait éveillé les soupçons des sentinelles. Ainsi, les adultes passent clandestinement la ligne de nuit par la Haute Lande, guidés par un des membres de la filière d’évasion tandis que les enfants arrivent discrètement à la papeterie ou au restaurant « chez Sidonie ». Ces derniers sont pris en charge par madame Croharé, suivant une procédure bien rodée. Accompagnée d’un de ses propres enfants sur le porte-bagages de sa bicyclette, elle se rend à la papeterie, comme elle en a l’habitude, afin de porter un repas à son mari. Elle prend alors en charge un ou deux enfants. Au retour, elle passe le contrôle du pont en centre ville, avec un soit-disant « neveu » ou « nièce » à ses côtés. Etant donné que les sentinelles habitent au premier étage de la maison Croharé, étage réquisitionné par l’occupant, ces soldats débonnaires connaissent parfaitement la famille, jusqu’à appeler les enfants par leur prénom. Aussi, ils ne demandent que très rarement les papiers à Madame Croharé et lèvent la barrière sans problème.

A la nuit tombée, les enfants qui ont dîné avec la famille, sont conduits par Hubert Croharé dans le jardin. Ils descendent le long de la rivière du moulin, remontent la pente à gauche pour rejoindre la sortie de Roquefort, près du fleuriste. Ils traversent ensuite la départementale, prennent le chemin du Pouy, et traversent la ligne de démarcation à Sarbazan. Au-delà, ils sont pris en charge par un membre de la filière ou par un membre de la famille.

En juillet 1944, trois aviateurs américains, rescapés d’un bombardier B 17 G abattu le 15 juin 1944 au-dessus de Mérignac (Gironde), arrivent à Geaune grâce à ce même réseau d’évasion. Le lieutenant Robert Disedow, l’adjudant Frank Champ et le sergent A. M. Campbell, peuvent regagner les Etats-Unis après être passés par l’Afrique du Nord.

Le vol de cartes d’alimentation

Pour aider ces clandestins ainsi que le nombre croissant de réfractaires au STO et de candidats au maquis il faut, entre autre, les nourrir et donc se procurer des tickets d’alimentation. C’est la raison pour laquelle des cambriolages de ces titres deviennent fréquents dans les mairies, soit pour assurer le ravitaillement en vivre des hors la loi locaux, soit pour fournir des groupes régionaux moins « favorisés ».

Les parachutages

Dans les Landes, la lutte clandestine contre l’occupant consiste principalement, jusqu’au Débarquement – et même après – à conduire des actions de sabotage. Sabotages d’usines de fabrication ou de traitement de produits réquisitionnés par l’ennemi et sabotages des moyens de communication destinés à retarder la remontée des Allemands vers les lieux de débarquement possible.

En 1943, le matériel demandé par les résistants landais se compose donc, avant tout, d’explosifs. Cependant, ils ont aussi besoin d’armes – les leurs ont été rendues aux autorités, dès 1941 – pour assurer leur protection au cours des actions de sabotage et prendre part, si nécessaire, aux combats contre l’ennemi.

Le matériel livré est conditionné en « containers » ou en colis ou paquets (paniers ou « packages » en anglais) et largué sous la responsabilité du « dispatcher ».

Ces « containers » contiennent des armes et des munitions et les notices de montage.

Des paquets, de toile souple caoutchoutée et d’un poids d’environ 50 kg, contiennent des pansements, du matériel sanitaire, du matériel radio, des vêtements, des chaussures et du ravitaillement – chocolat, cigarettes, biscuits.

carte resistance

Les sabotages

Les sabotages du 1er mai 1942

A l’approche du 1er mai 1942, dans toute la France, les journaux de la Résistance, des tracts appellent les patriotes à l’action. En zone occupée les F.T.P. lancent des actions de sabotage. Les groupes F.T.P. de Carcen-Ponson et de Souprosse sont prêts à passer à l’action.

Deux usines travaillant pour l’Allemagne nazie sont prises pour cible, l’usine de distillerie de résine de Ponson et celle de Tartas. Les productions d’essence de térébenthine et de colophane de ces distilleries sont expédiées en Allemagne pour l’industrie de guerre nazie. Les sabotages sont accomplis le 1er mai par les groupes F.T.P de Carcen et de Souprosse.

La destruction d’avions, le 30 septembre 1943 à Aire-sur-l’Adour.

L’usine d’aviation Fouga à Aire-sur-l’Adour construit des appareils pour l’Allemagne nazie. Elle est occupée par un détachement de militaires et de spécialistes civils allemands.

Albert Broqua apprend que ces derniers ordonnent le recensement des appareils disponibles pour le transporter vers des centres d’instruction afin d’être utilisés à la formation des élèves pilotes de la Luftwaffe. Il alerte aussitôt les hommes du SAP (Service des Atterrissages et Parachutages)

Le 29 septembre, René Faix et Maurice Daudon sont appelés chez Broqua. Ils y rencontrent « Jimmy » (Jimmy est le nom de guerre de Jacques Trouchet, neveu de René Méricam). Il vient de Mirande (Gers) et apporte les explosifs nécessaires pour tenter une opération à l’usine Fouga afin de détruire les appareils convoités par les Allemands.

Les explosions se font entendre entre 1 h 50 et 3 h 54 d’après le rapport de gendarmerie.

Vers une organisation de la Résistance

Petit à petit, ces individualités se regroupent par connaissance (elles ont fréquenté la même école, le même club sportif), par affinités politiques ou idéologiques. C’est à partir de la fin de 1942 que ces groupes se structurent vraiment. Parmi les résistants de l’intérieur il est toutefois fréquent de trouver des personnes qui œuvrent et ignorent si elles appartiennent à telle ou telle organisation. Certaines, parfois sans le savoir, aident plusieurs groupes. Il y en a qui, apprenant les idéaux du groupe auquel elles participent, en changent par refus de travailler avec les Anglais, avec les Gaullistes ou avec les communistes.

Progressivement, les arrestations de Juifs, l’occupation de tout le pays, le rationnement plus sévère, les réquisitions de plus en plus nombreuses, la création du STO, les rafles contre les chantiers de la jeunesse, la politique de collaboration qui ne se cache plus, lancent dans la Résistance, de nombreux Landais, malgré les dangers qu’ils connaissent. Les départs pour l’Afrique du Nord et l’Angleterre sont de plus en plus nombreux : ils sont le fait de résistants recherchés par l’occupant le plus souvent ou de ceux qui veulent se soustraire au STO. Tous ne s’engagent pas dans les FFL.

À la fin de l’année 1943, la Résistance landaise devient une force crédible. De plus en plus importante et organisée, elle peut envisager de mettre en place de véritables actions militaires ou de sabotage. Toutefois, ce n’est qu’au cours de l’année 1944 qu’elle parvient à être particulièrement active, avec l’imminence du débarquement puis de la défaite allemande[1]https://www.histoiresocialedeslandes.fr/p5_resistances.asp.

D’autres Français ont choisi pour résister une autre voie que la France combattante en acceptant de faire partie d’un réseau de renseignement comme le réseau « Alliance » par exemple, actif dès la fin de 1940.

Pensons aussi à ceux qui, sans être dans une organisation, ont résisté : anonymes ou non qui ont aidé des Juifs ou des personnes recherchées (notamment les prisonniers de guerre en fuite, les équipages d’avions « descendus » par la DCA allemande,…) à passer la ligne de démarcation, secrétaires de mairie qui ont favorisé le vol de tickets de rationnement ou de tampons officiels, gendarmes ou policiers qui ont participé à la Résistance ou tout au moins n’ont montré que peu de zèle dans leurs recherches, tous ceux qui, dans les campagnes ou les villes, ont caché armes et hommes, ravitaillé les clandestins,…

Le rôle de la Résistance dans la Libération

En 1944, la lutte s’accélère entre les diverses forces de la Résistance landaise et les autorités allemandes et françaises. Après une courte trêve pendant l’hiver 1943-1944, les attentats redoublent au début de l’année 1944. Le groupe de l’inspecteur André Bouillar ( » Dédé le Basque « ) est particulièrement actif dans le sud du département, où il fait sauter à Bayonne les sièges du Parti populaire français, de la Ligue des Volontaires Français (L.V.F.), du Rassemblement national populaire et du groupe  » Collaboration « , les principales organisations collaborationnistes de la région.

En parallèle avec l’intensification des actes de sabotage et des attentats, les différents groupes se préparent progressivement au déclenchement de la lutte armée, qu’ils sentent tous imminente. Preuve de cette imminence, la base aérienne de Mont-de-Marsan est bombardée par l’aviation anglaise le 27 mars 1944. Dans le même temps, la répression continue de décimer les rangs communistes jusqu’à la veille du débarquement. En mai 1944, un groupe de miliciens attaque le maquis F.T.P. de Peyrehorade, tandis que la Gestapo et la police française lancent un vaste coup de filet dans les régions d’Amou, de Sault-de-Navailles et de Hossegor contre les petits groupes F.T.P. qui y stationnent. Une trentaine de militants sont arrêtés et déportés en Allemagne ; 17 n’en reviennent pas.

reseaux resistants

À la veille du débarquement, les forces de la Résistance sont réparties dans tout le département mais sont encore divisées. L’A.S., sous l’autorité de Léonce Dussarrat, couvre la majeure partie du département. Les maquis F.T.P. sont quant à eux essentiellement disséminés dans le nord et le nord-est. Ils restent isolés et largement sous-équipés. Cette zone, plus particulièrement le nord-est du département, est également le champ d’action du réseau S.O.E.  » Wheelwright « . Il convient d’ajouter aux forces issues de la Résistance landaise les mouvances issues du département voisin du Gers, essentiellement l’Organisation de résistance de l’armée (O.R.A.) qui regroupe des militaires entrés en résistance et qui est représentée dans le sud-ouest de la France par les Corps-Francs du colonel Pommiès. Ces différentes forces ne sont pas unifiées.

C’est donc l’état-major de l’A.S. qui reçoit le premier les consignes de Londres pour déclencher les vagues de sabotages et les premières opérations militaires de l’année 1944. Ainsi, à partir de juin 1944, et pour reprendre l’expression des résistants gersois :  » Léon fait tout sauter dans les Landes.  » Voies ferrées, lignes téléphoniques et télégraphiques, lignes électriques et ponts sont ainsi systématiquement détruits, notamment dans les régions de Dax et de Mont-de-Marsan, avec pour objectif de couper l’envoi de renforts vers la Normandie et le nord de la France.

Les divers groupes appliquent également les ordres de harcèlement systématique des convois de soldats allemands et de miliciens. En réponse, les forces d’occupation accroissent encore la répression, et les accrochages entre maquisards et troupes allemandes se multiplient. À la suite de l’un d’entre eux, l’état-major allemand décide de s’en prendre en personne à Léonce Dussarrat et au maquis qu’il dirige, lançant contre lui une colonne de 7 000 à 8 000 soldats. « Léon des Landes » parvient à assurer sa retraite en faisant exploser le dépôt d’armes et de munitions reçues peu de temps auparavant par parachutage.

En juillet, les sabotages se multiplient encore, l’ensemble des groupes résistants ayant fini par prendre connaissance de l’avancée des troupes alliées et de la nécessité de couper la voie des renforts allemands. On ne compte pas moins d’une centaine de sabotages ferroviaires à cette époque.

L’explosion du train de Laluque

Le 27 juillet 1944, suite aux ordres du chef départemental des FFI, Léonce Dussarrat, de neutraliser un gigantesque train de munitions allemand qui devait se diriger vers le front de Normandie, Henri Ferrand, jeune instituteur de 24 ans, membre du groupe de résistants de Pontonx (dirigé par Robert Labeyrie), parvient audacieusement à le faire sauter. Les dégâts sont considérables. Le général Patton a écrit que ce sabotage lui avait permis de s’emparer de Rennes. Churchill lui-même dira qu’il s’agissait là de « l’un des sabotages les plus spectaculaires de l’été 44 »

Le 17 août, l’état-major suprême des forces alliées donne l’ordre à toutes les forces de la résistance du quart sud-ouest de la France de passer à l’offensive.

Le 19 août, la garnison allemande de Lourdes se rend, et, le lendemain, l’ordre de retraite générale est donné par l’état-major allemand. L’offensive des groupes résistants dépasse rapidement les troupes allemandes, qui quittent Mont-de-Marsan sans même détruire la base aérienne.

Le 21 août, la population accueille triomphalement les résistants qui confluent vers la ville, quand on signale l’arrivée d’une importante colonne allemande remontant de Pau après avoir traversé Dax. Une embuscade est aussitôt organisée, et, après un combat acharné (au Pont de Bats), les troupes allemandes sont contraintes de faire demi-tour vers Dax. Cette dernière est libérée le 24 août.

La veille, le 23 août, un groupe de résistants de Soustons avait attaqué une série de camps de prisonniers, libérant ainsi près de 3 000 soldats sénégalais, qui constituent par la suite le 14e régiment de tirailleurs sénégalais.

Le 24 août, un dernier accrochage avec les troupes allemandes eut lieu à Lisposthey. Le lendemain, le département des Landes était officiellement libéré. Un Comité départemental de libération d’une trentaine de membres est aussitôt formé, sous la présidence de Charles Lamarque-Cando, et désigne Paul Chary comme nouveau préfet des Landes.

Le 1er janvier 1945, les résistants landais devenus « Bataillon nord-landais » pour participer à la libération de Bordeaux deviennent une unité régulière, le 34e régiment d’infanterie, placé sous le commandement de Léonce Dussarrat, élevé au grade de lieutenant-colonel. En avril, le 34e régiment d’infanterie libère Le Verdon puis la pointe de la Grave et reçoit la reddition de l’état-major allemand. Le conflit est terminé, pour les Landes et pour les Landais[2]https://www.histoiresocialedeslandes.fr/p5_liberation.asp.


Voir aussi : La Résistance en France